
Le Conseil militaire de transition, qui assure l’intérim du pouvoir, a précisé qu’un accord définitif
Ce n’est pas encore le triomphe de la révolution, mais un pas
important dans le processus de retour à la démocratie en cours au
Soudan. Dans un climat de tension, au lendemain d’une nuit de violences,
lundi 13 mai, où des éléments encore mal identifiés des forces armées
ont tenté d’écraser le mouvement populaire qui occupe les rues de
Khartoum pour réclamer le retour d’un pouvoir civil, les deux parties
engagées dans des négociations pour décider du futur du Soudan sont
arrivées à un premier accord, dans la nuit de mardi 14 à mercredi 15
mai.
Les
généraux du Conseil militaire de transition (TMC) et les négociateurs
civils représentant les forces de la Déclaration pour la liberté et le
changement (FDFC) se sont accordés sur un cadre général : le TMC cédera
le pouvoir pour trois ans à un conseil de souveraineté dont la
composition précise est encore en cours de négociation. Cet organe sera
placé à la tête du Soudan, mais exercera le pouvoir de façon symbolique.
Un gouvernement gérera les affaires courantes et devra contribuer à
amener le pays jusqu’à des élections au terme d’une période de
transition que les généraux voulaient limiter à deux ans.
Les
civils, dont ceux qui avaient théorisé le cadre politique de
l’après-Omar Al-Bachir – le président renversé le 11 avril après trois
mois de manifestations et près de trente ans de pouvoir – dès la fin
2018, la voulaient deux fois plus longue. Ils estimaient en effet que
quatre années seraient nécessaires pour créer sur de nouvelles bases un
environnement démocratique capable de stabiliser le Soudan.
Ressusciter l’économie
Les
partis politiques sont, à l’exception notable du Parti du Congrès
soudanais (SCP) d’Omar El-Digeir, déconsidérés aux yeux de l’opinion
publique et des foules qui mènent ce qu’ils appellent « révolution », un
terme qui montre la soif de changement vis-à-vis d’un système politique
pourri par des années de compromission avec le système mis en place par
les fidèles d’Omar Al-Bachir.
Pendant les trois années
de transition, il y aura fort à faire. Une assemblée législative de 300
membres sera créée. Elle devra être composée à 67 % (200 personnes) de
membres de l’alliance qui a mené la contestation, les FDFC. Cette vaste
coalition intègre, en son sein, d’autres regroupements dont font partie
les groupes armés encore actifs au Soudan. Les six premiers mois de la
transition devront être consacrés, en priorité, à ressusciter l’économie
et à faire la paix avec ces groupes. Cent personnes issues de
formations qui ne sont pas incluses dans les FDFC composeront le dernier
tiers de l’assemblée législative.
Selon les premiers
termes de cet accord, le TMC accepte donc de céder une partie de ses
prérogatives, célébrant en des termes surprenants pour les généraux « la victoire de l’armée et du peuple afin de réaliser les objectifs de la glorieuse révolution ».
Avant toute chose, il faudra examiner la composition exacte des
différents organes. Les négociations avec les groupes armés ne
constitueront pas le seul obstacle.
« Hors contrôle »
Il
faudra aussi traiter la question des membres des organes de sécurité et
de renseignement qui ont disparu depuis la chute d’Omar Al-Bachir, et
résoudre cette équation complexe : comment faire pour créer les bases de
la confiance entre de multiples parties, incluant les éléments armés
les plus puissants à l’heure actuelle, ceux des Forces de soutien rapide
(RSF) du général Hemetti.
Certains de leurs personnels
sont accusés d’être impliqués dans les fusillades de lundi soir, à
Khartoum. Le TMC s’est désolidarisé de ces groupes d’hommes en
uniformes, les traitant d’éléments « hors contrôle ». Une
commission d’enquête est supposée faire le jour sur ces événements et
sur l’identité comme sur les intentions de ceux qui ont tué cinq
manifestants, et perdu l’un des leurs.