
Cette législation, qui menace de suspendre le statut économique spécial
de l’ex-colonie britannique, a
été qualifiée d’« abomination absolue »
par Pékin, qui évoque d’éventuelles représailles.
Le président américain a longtemps
hésité, pesant le pour et le contre à propos de la loi soutenant le camp
prodémocratie à Hongkong, assurant être « avec » les
manifestants, tout en réitérant sa confiance dans son homologue chinois,
Xi Jinping. Mais après quelques jours de tergiversations, Donald Trump a
finalement promulgué, mercredi 27 novembre, l’« acte de 2019 sur les droits humains et la démocratie à Hongkong ».
Approuvée une semaine plus tôt à une écrasante majorité par le Congrès des Etats-Unis, cette législation menace de suspendre le statut économique spécial accordé par Washington à Hongkong – il permet à ce territoire d’être
exonéré des restrictions s’appliquant à la Chine continentale. Le texte
conditionne désormais son maintien à la validation annuelle par
l’administration américaine d’une situation jugée convenable en matière
de respect des droits de la part des autorités hongkongaises.
Le
Congrès avait également approuvé une mesure interdisant la vente à la
police hongkongaise de matériel destiné à réprimer les manifestations.
Une résolution également promulguée par Donald Trump.
L’ambassadeur des Etats-Unis à Pékin convoqué
Sans
surprise, cette loi a provoqué l’ire de Pékin. L’ambassadeur des
Etats-Unis en Chine, Terry Branstad, a été convoqué jeudi, pour la
deuxième fois en l’espace de quatre jours, au ministère des affaires
étrangères. Le vice-ministre chinois des affaires étrangères, Le Yucheng, lui a fait part de la « ferme opposition » de son pays et exhorté les Etats-Unis à « corriger leur erreur » afin de ne pas « nuire davantage aux relations et à la coopération sino-américaines », a indiqué le ministère dans un communiqué.
Qualifiant ce texte d’« abomination absolue », au motif qu’il soutient « effrontément
les actes commis contre d’innocents citoyens qui ont été frappés,
blessés et brûlés (…) par des criminels violents » , le gouvernement chinois a menacé de prendre « des mesures de représailles », sans préciser lesquelles.
Moins vindicatif, le gouvernement hongkongais a, de son côté, accusé Washington d’« ingérence » dans ses affaires intérieures. « Les deux actes s’immiscent manifestement dans les affaires intérieures de Hongkong », a déclaré un responsable de l’exécutif dans un communiqué, estimant que cette résolution envoie « un mauvais message aux manifestants ».
Le Bureau de liaison de Pékin à Hongkong a également condamné la « conduite répugnante » de Washington qui pourrait entraîner « trouble et chaos » dans le territoire semi-autonome chinois.
Aux Etats-Unis, la décision de Donald Trump a été saluée des deux côtés de l’échiquier politique. « [Notre pays]
se tient aux côtés des manifestants alors qu’ils marchent vers leur
autonomie, pour leur démocratie et pour leurs droits humains », a écrit Ben Cardin, sénateur démocrate du Maryland. « J’applaudis le président Trump de promulguer cette législation essentielle en loi », a abondé son collègue républicain Marco Rubio (Floride).
Les
militants prodémocratie hongkongais se sont également félicités,
affirmant qu’elle contribuerait à l’établissement d’un consensus
international en faveur de leur mouvement.
Vers un accord commercial
Sur
le front commercial, la question est de savoir si cette décision va
mettre en péril les tractations délicates menées par Washington et
Pékin. Les deux premières puissances mondiales se livrent depuis l’an
dernier une guerre commerciale à coups de hausse de droits de douane.
Ces
derniers jours, ils ont envoyé des signaux positifs quant à la
conclusion, avant la fin de l’année, d’un accord commercial partiel, dit
de « phase un ». « Nous sommes dans la dernière ligne droite avant de parvenir à un accord très important », a avancé hier M. Trump.
L’ancien
magnat de l’immobilier new-yorkais a cherché, en tout cas, à soigner
ses relations avec son homologue chinois, Xi Jinping. Dans un communiqué
justifiant sa décision, M. Trump fait part de son « respect pour le président Xi (Jinping), la Chine et le peuple de Hongkong ». Signe de l’équation délicate dans laquelle il se trouvait, le 45e président des Etats-Unis était resté vague ces derniers jours sur ses intentions : il avait, d’un côté, assuré être « avec » les manifestants prodémocratie, tout en assurant avoir confiance en Xi Jinping pour résoudre la crise.
Une manifestation sur le thème de Thanksgiving
Hongkong,
territoire autonome chinois, connaît un mouvement de contestation d’une
ampleur inédite depuis sa rétrocession à la Chine en 1997. Le mouvement
a débuté en juin à la suite du rejet d’un projet de loi visant à
autoriser les extraditions vers la Chine continentale. Au fil des mois,
les manifestations et les actions sont devenues de plus en plus violentes.
La
police est entrée jeudi dans l’Université polytechnique où des
centaines de manifestants, assiégés par les forces de l’ordre, s’étaient
retranchés pendant onze jours. Depuis, ils semblent avoir quitté le
campus.
Dans les jours qui ont précédé les élections locales qui se sont tenues dimanche et se sont soldées par une victoire écrasante des candidats prodémocratie, le mouvement de contestation s’est apaisé. Il n’y pas eu depuis d’importantes manifestations.
Mais
les contestataires prévoyaient dans la soirée une manifestation sur le
thème de Thanksgiving, la grande fête familiale américaine qui tombe ce
jeudi, « en l’honneur de ceux qui soutiennent leur mouvement ».