
L'une des plus gros courtiers en pétrole, Hin Leong Trading, a
enregistré une perte de 800 millions de
dollars. La faillite
controversée de la société du milliardaire « OK Lim », intervenue avant
le dernier krach pétrolier aux Etats-Unis, expose la dérive du trader
surnommé le « Loup de Singapour ».
Le contre-choc pétrolier a fait des
victimes dans la communauté des spéculateurs et des traders, même
chevronnés. La firme de courtage singapourienne Hin Leong Trading a
ainsi perdu 800 millions de dollars, une estimation conservatrice, sur
les contrats à terme sur le marché pétrolier. Soit plus de 10 fois son
bénéfice de 2019 (78 millions de dollars pour son exercice arrêté au
31 octobre). Ces pertes ont été enregistrées avant le plongeon
historique, lundi, des cours du pétrole aux Etats-Unis en territoire négatif . Un nouveau krach qui n'a sans doute pas manqué de faire lui aussi des victimes.
« Prospérité »
Hin
Leong Trading a demandé à être placé en faillite. Fondée en 1963, la
firme avait choisi de s'appeler « Hin Leong » (prospérité, en chinois),
pour se porter chance dans un secteur aventureux, soumis aux aléas des
marchés et du commerce mondial. Cette affaire familiale, avait été créée
par Lim Oon Kuin, surnommé « OK Lim » (1,5 milliard de dollars de
fortune personnelle selon le magazine « Forbes »). Il a admis avoir
caché les pertes de trading de sa firme, accumulées au fil des années,
mais qui se sont sans doute fortement accentuées au premier trimestre
avec le plongeon des cours du pétrole.
L'enquête
devra déterminer si la société de trading de Singapour a été victime de
la prise de risque inconsidérée d'un ou de plusieurs de ses traders indélicats , baptisés « rogue traders » ( traders escrocs
). Autre hypothèse, OK Lim, un grand joueur de poker, a pu parfaitement
assumer la prise de risque de ses opérateurs et les couvrir, sinon les
encourager.
Des précédents
L'année
dernière, Petro Diamond Singapore (groupe Mitsubishi) a perdu
320 millions de dollars sur les dérivés sur le pétrole à cause des
agissements d'un trader (Jack Wang). Trois autres groupes connurent de
telles déconvenues. Le pionnier fut le groupe allemand
Metallgesellschaft dont un trader perdit 2,6 milliards de marks en 1993
sur les contrats à terme sur le pétrole. Unipec, une filiale de Sinopec
perdit 680 millions de dollars sur le pétrole en 2018. La facture de la
spéculation d'un de ses traders fut de 550 millions de dollars pour la
China Aviation Oil (Singapore). Sur les matières premières, le record de
pertes (gaz naturel) fut pour le fonds spéculatif Amaranth :
6,5 milliards de dollars, en 2006.
Banques exposées
La
société est très endettée auprès des banques, pour 3,85 milliards de
dollars. HSBC est en tête (600 millions de dollars) suivis par ABN Amro
(300 millions) et Société Générale (240 millions de dollars). Pour
obtenir ces prêts, la firme de trading avait apporté en garantie des
millions de barils de pétrole qu'elle détenait dans ses entrepôts. Or
l'entreprise a annoncé qu'elle avait vendu une « part substantielle » de
ses stocks pour récupérer des liquidités. La valeur de ses dettes est
six fois supérieure à celle de ses actifs. Un déséquilibre accentué par
le krach du pétrole au premier trimestre. Début avril, la valeur de son
stock de pétrole était de 141 millions de dollars contre 1,3 milliard de
dollars fin octobre.
Hin Leong
Trading pourrait être rachetée à bas prix par un groupe étranger.
L'entreprise chinoise Sinopec aurait manifesté son intérêt, selon le
« Financial Times ». Unipec, une filiale de ce groupe pétrolier chinois
perdit elle aussi beaucoup d'argent sur les marchés pétroliers,
680 millions de dollars en 2018.
Par lesechos.fr