
Dans les rues de Louisville (Kentucky), les manifestants qui dénoncent
les violences policières
scandent les noms de George Floyd, d'Ahmaud
Arbery, mais aussi celui de Breonna Taylor, une agent de santé tuée de
huit balles par des policiers. Ils réclament que son nom ne soit pas
oublié et que justice lui soit rendue.
Breonna Taylor aurait eu 27 ans le vendredi 5 juin. Ce jour-là, des
centaines de manifestants sont descendus dans le centre-ville de
Louisville, dans l'État du Kentucky, pour réclamer l’arrestation et
l’inculpation des policiers impliqués dans la mort de cette technicienne
en soins médicaux tuée le 13 mars dernier à son domicile. Certains ont
entonné un "Happy Birthday" tandis que d’autres ont envoyé des cartes
d’anniversaire au procureur général du Kentucky, Daniel Cameron, pour
réclamer justice, selon le New York Times.
Dans le même temps, sur les réseaux sociaux, la ferveur est aussi vive
pour cette jeune Afro-américaine qui rêvait de devenir infirmière. "#BreonnaTaylor devrait célébrer son 27e
anniversaire. Au lieu de cela, elle été tuée par balles alors qu’elle
dormait dans son lit. Les policiers n’ont pas été inculpés", peut-on
lire dans les tweets d’internautes en colère.
Depuis, le nom de Breonna Taylor est devenu indissociable du hashtag
#SayHerName, un mouvement social né en 2015 dans la lignée du mouvement
"Black Lives Matter" et destiné à rappeler que les femmes noires aux
États-Unis sont tout aussi victimes de violences policières que les
hommes. La sénatrice Kamala Harris a partagé ce sentiment sur Twitter.
"Nous ne pouvons pas oublier les femmes noires dans notre quête de
justice", a-t-elle écrit.
"Sa vie a été tragiquement prise par la police et nous ne cesserons de
marcher pour la justice tant qu'elle n'aura pas servi pour elle et sa
famille. #SayHerName", a pour sa part déclaré le sénateur Cory Booker,
démocrate du New Jersey.
Des personnalités telles que les actrices Millie Bobby Brown, Emily
Ratajkowski ou encore la chanteuse Cardi B se sont également jointes à
cette mobilisation sur la Toile.
"Nous n'essayons pas de rivaliser avec l'histoire de Floyd"
"Toutes les vies des Noires comptent", a commenté dans les colonnes du New York Times
Andrea Ritchie, auteur de "Invisible No More: Police Violence Against
Black Women and Women of Color" (Plus jamais invisibles : les violences
policières subies par les femmes noires et les femmes de couleur). Nous
n'essayons pas de rivaliser avec l'histoire de Floyd,
nous essayons de terminer l'histoire", ajoute la militante qui s’étonne
que le nom de Breonna Taylor ne soit pas davantage scandé dans les
manifestations qui agitent actuellement les États-Unis.
Pendant
plusieurs semaines, le cas Breonna Taylor est resté oublié des médias.
Probablement à cause de l’attention médiatique largement focalisée, à
l’époque, sur l’épidémie de Covid-19, avance l’avocat de la famille
Taylor, Ben Crump. Mais aussi l’absence de vidéo lors de la mort de la
jeune femme, contrairement à celles d’Ahmaud Arbery et de George Floyd.
Les
faits sont là : vers 1 h du matin, le 13 mars, trois policiers en civil
ont perquisitionné à l’adresse de la Breonna Taylor avec un mandat.
Lorsque les policiers sont entrés dans l’appartement après avoir défoncé
la porte d’entrée, son fiancé, Kenneth Walker, s’est emparé de son arme
et a tiré un coup de feu, touchant l’un des policiers à la cuisse. L’un
d’eux a répliqué en tirant au moins 20 coups de feu en direction du
couple. Breonna Taylor a reçu au moins huit balles.
Après avoir
survécu miraculeusement à la fusillade, Kenneth Walker a été arrêté et
accusé de tentative de meurtre, avant la levée des poursuites le mois
suivant.
"Le 2e amendement ne s’applique pas pour les Afro-Américains"
Selon le Louisville Courier Journal,
la police enquêtait sur deux hommes qui, selon eux, vendaient de la
drogue dans une maison éloignée du domicile de Breonna Taylor. Mais un
mandat a été signé pour autoriser la police à fouiller dans son
appartement, au motif que l’un des deux hommes avait utilisé cette
adresse pour recevoir des colis. Il permettait aux forces de l’ordre
d’entrer sans avertissement et sans s’identifier.
"Le deuxième
amendement ne s’applique pas pour les Afro-Américains. [Breonna Taylor
et Kenneth Walker] pensaient être victimes de cambriolage", a dénoncé
Ben Crump, l’avocat de la famille et spécialiste des droits civiques,
lors d’une entrevue sur CBS. Il bataille pour que la mort de la jeune
femme soit requalifiée en meurtre.
Depuis la fin mai, le FBI a
ouvert une enquête sur les circonstances entourant la mort de Breonna
Taylor. Selon les derniers éléments de l’enquête, les policiers n’ont
pas trouvé de drogue dans l’appartement de la jeune femme et le
revendeur de drogue recherché était déjà interpellé au moment où le
mandat de perquisition a été exécuté.
Reste que les trois
policiers de Louisville impliqués dans cette affaire n’ont, pour
l’heure, jamais été inquiétés. À Louisville, la tension s’intensifie
dans les rues. Le 1er juin, en marge des manifestations
contre les violences policières, la police a de nouveau abattu un
restaurateur de 53 ans, David Mc Atee. Il était afro-américain.
France24