Le gouvernement de Donald Trump
prépare lundi la reprise des exécutions fédérales interrompues
depuis 17 ans, malgré la vive opposition exprimée par des proches des
victimes, les milieux religieux et l'Union européenne.
Sauf si la justice lui accorde un répit à la dernière minute, Daniel
Lee, 47 ans, recevra une injection létale de pentobarbital dans la
chambre de la mort du pénitencier de Terre-Haute dans l'Indiana (nord).
Ancien
partisan de la suprématie blanche, il a été condamné en 1999 à la peine
capitale pour le meurtre d'un couple et d'une fillette de huit ans.
Disant
"agir au nom du public et des familles", l'administration républicaine a
programmé deux autres exécutions cette semaine, et une quatrième
le 28 août. Toutes concernent des hommes condamnés à la peine de mort
par des tribunaux fédéraux pour le meurtre d'enfants.
Aux Etats-Unis,
la plupart des crimes sont jugés au niveau des Etats, mais la justice
fédérale peut se saisir des actes les plus graves (attentats, crimes
racistes...) ou commis sur des bases militaires, entre plusieurs Etats
ou dans des réserves amérindiennes.
Au cours des 45 dernières années, seules trois personnes ont été exécutées au niveau fédéral, dont Timothy McVeigh responsable de l'attentat d'Oklahoma City (168 morts en 1995) en 2001. La dernière exécution fédérale remonte à 2003.
"Irresponsable"
A
la surprise générale, le ministre de la Justice Bill Barr a toutefois
annoncé il y a un an son intention de renouer avec cette pratique. Après
une série de rebondissements judiciaires, il a fixé en juin le
calendrier, au moment même où les cas de nouveau coronavirus repartaient
à la hausse dans une grande partie du pays.
Or, une exécution
implique de nombreuses personnes: "le personnel pénitencier, des
avocats, des proches des victimes ou des accusés, des journalistes, un
aumônier...", énumère pour l'AFP Robert Dunham, le directeur du Centre d'information sur la peine de mort (DPIC) qui fait référence sur le sujet.
C'est
"irresponsable de vouloir mener autant d'exécutions en si peu de temps"
dans ce contexte de crise sanitaire, ajoute-t-il, en dénonçant une
"instrumentalisation politique de la peine capitale".
Selon les
sondages, le soutien pour la peine de mort s'est érodé chez les
Américains mais reste fort chez les électeurs républicains qui sont 77 %
à y être favorables pour les meurtriers.
Devant ses partisans,
Donald Trump, qui espère décrocher un second mandat le 3 novembre,
réclame régulièrement un usage renforcé de cette sanction ultime,
notamment pour les tueurs de policiers ou les trafiquants de drogue.
"Plus de douleur"
A
l'approche de l'échéance, les appels se sont toutefois multipliés pour
que le locataire de la Maison Blanche fasse preuve de clémence envers
Daniel Lee.
"En tant que partisane du président Trump, je prie
pour qu'il entende mon message: l'exécution de Danny Lee pour le meurtre
de ma fille et de ma petite-fille n'est pas ce que je veux et apportera
plus de douleur à ma famille", a notamment déclaré Earlene Peterson,
mère de Nancy Mueller, assassinée en 1996, dans une lettre ouverte
adressée au milliardaire new-yorkais.
Un autre homme qui avait
joué un rôle central dans les meurtres n'a écopé que d'une peine de
réclusion à perpétuité, a souligné cette femme de 81 ans: "Nous pensons
que c'est ce que M. Lee mérite."
En
parallèle, avec d'autres membres de la famille, elle a introduit un
recours en justice pour obtenir un report de l'exécution. Invoquant leur
vulnérabilité au nouveau coronavirus, ils ont plaidé qu'ils se
trouvaient dans un choix impossible entre leur droit d'assister aux
derniers moments du condamné et le respect de leur santé.
Un
tribunal de première instance leur a donné raison vendredi soir, mais
une cour d'appel saisie en référé a cassé la décision dimanche. Dans la
foulée, ils ont saisi la Cour suprême, qui devra trancher en urgence.
Les avocats de M. Lee ont également introduit des requêtes de procédures, dont l'issue reste également en suspens.
De
leur côté, un millier de responsables religieux, catholiques et
évangéliques, ont appelé le président à se "concentrer sur la protection
de la vie et non sur les exécutions" en ces temps de Covid-19.
Et
vendredi l'Union européenne lui a demandé de "reconsidérer" une
position qui, selon elle, "va à l'encontre d'une tendance générale aux
Etats-Unis et dans le monde d'abolir la peine de mort, par la loi ou en
pratique".
De fait, "seules" 22 exécutions ont eu lieu en 2019 aux Etats-Unis et sept depuis le début de l'année.
Par AFP avec Lepoint.fr