
Le stress engendré par cette période puis par le déconfinement a fait resurgir les troubles alimentaires d'ancien·nes malades, rendant difficile un retour à la normale.
Pendant le confinement lié à la pandémie de Covid-19, certains
parents ont été confrontés à l'isolement. À présent, ils sont en proie à
la pression liée à la réintégration dans un monde qui a changé et
doivent se réapproprier leur corps qui n'a presque pas quitté la maison
pendant cinq ou six mois.
Pour les parents ayant des antécédents
de régimes ou de troubles alimentaires, la monotonie du rythme familial
et la gestion permanente des repas des enfants ont pu provoquer un
retour des habitudes pernicieuses, comme sauter un repas ou se gaver
puis se faire vomir, relate The New York Times.
Effet pervers du confinement
Aux
États-Unis, la National Eating Disorder Association a constaté une
augmentation de 78% des messages envoyés à son service d'assistance
téléphonique en mars et avril par rapport à la même période l'année
dernière. Et une étude australienne
portant sur 5.469 personnes, publiée le mois dernier, a révélé que
64,5% des sondé·es ayant des antécédents de troubles alimentaires ont
déclaré limiter davantage leur consommation de nourriture depuis la
pandémie, tandis que 35,5% ont fait état d'une augmentation de leur
frénésie alimentaire.
«Au fond, les comportements alimentaires désordonnés sont des stratégies d'adaptation», analyse Lisa Du Breuil, psychothérapeute qui traite les troubles alimentaires au Massachusetts General Hospital. «Quand
nous sommes stressés, nous nous rabattons sur ce qui nous est le plus
familier. Nous vivons tous avec cette menace existentielle permanente.
Bien sûr, cela va se manifester dans la manière de s'alimenter.»
«Avant
la mise en place du confinement, vous aviez des pauses déjeuner, la
journée d'école, l'heure du coucher et tous ces autres indices externes
qui, autrefois, fournissaient une structure pour les activités de base
d'autogestion de la santé», rappelle Ayana Habtermariam, une thérapeute nutritionniste de Virginie. «Les parents doivent maintenant se recréer par eux-mêmes.»
Double effet du confinement
«Les
troubles de l'alimentation se développent dans l'isolement, car il y a
déjà tellement de honte et de stigmatisation que beaucoup de
comportements se tiennent en secret», abonde Rachel Millner, thérapeute spécialisée dans les troubles alimentaires. «Lorsque
vous êtes littéralement isolé toute la journée et que vous n'avez pas
les mêmes possibilités de vous asseoir et de manger avec d'autres
personnes, le trouble s'intensifie.»
Au fur et à mesure que
la pandémie progresse, les thérapeutes affirment que le bilan de cet
isolement ne fait que s'aggraver, car les individus se sentent de plus
en plus anxieux, déprimés et seuls.
Mais la réouverture des villes
apporte de nouveaux stress. Après tout, l'isolement offre un petit
répit à l'insatisfaction corporelle. «J'ai beaucoup de patients qui
ont ressenti un certain soulagement de se concentrer sur leur corps,
parce qu'ils ne voient pas d'autres personnes et qu'ils peuvent passer
la journée dans des vêtements confortables», constate Rachel Millner.
Par Slate