
Le fossoyeur du format CD, dont le logiciel de partage de chansons a
dynamité le monde de la
musique au début des années 2000, vient d'être
cédé pour 70 millions de dollars à MelodyVR, spécialisé dans la
retransmission de concerts en réalité virtuelle.
Son
logiciel a fait trembler les majors de la musique à l'époque où les
ventes de CD leur apportaient encore de plantureux revenus. L'ex-étoile
montante du Net Napster a été vendue mardi pour seulement 70 millions de dollars à MelodyVR,
une start-up britannique créée il y a à peine deux ans et spécialisée
dans la retransmission payante de concerts en streaming et en réalité
virtuelle.
La société cofondée en juin 1999 par Sean Parker, alors âgé de dix-neuf ans, avant qu'il n'investisse ensuite dans Facebook,
et par son ami Shawn Fanning, un adolescent de dix-huit ans de
l'université Northeastern à Boston, avait dynamité le monde musical en
inventant un programme permettant aux internautes d'échanger
gratuitement de la musique depuis n'importe quel disque dur dans le
monde.
De quoi lui apporter un succès
fulgurant : un an après son lancement, 14.000 morceaux sont téléchargés
chaque minute sur la plateforme de partage par des dizaines de millions
d'internautes… en toute illégalité. Les maisons de disques obtiendront
dès 2001 la fermeture du service, attaqué avec succès en justice par le
groupe Metallica pour violation du droit d'auteur. Il sera ensuite
relancé sous la forme d'une plateforme légale de téléchargement, puis de
streaming musical.
Trois millions d'utilisateurs
Pionnier du téléchargement, fossoyeur du format CD, mais surtout véritable rampe de lancement pour la musique numérique
, Napster compte aujourd'hui 3 millions d'utilisateurs et un catalogue
de 90 millions de chansons, mais n'a jamais pu rivaliser face aux
nouveaux géants du streaming. MelodyVR, qui le rachète à l'américain RealNetworks, compte l'adosser à son activité de concerts et d'événements virtuels pour créer « un service musical de nouvelle génération ».
L'opération
a tout d'un « reverse takeover », tant l'acheteur reste de taille
encore modeste par rapport à la cible. MelodyVR, qui a déjà diffusé les
concerts d'une centaine d'artistes dont Emeli Sandé, les Chainsmokers ou
encore Cypress Hill, et bénéficié ces derniers mois de l'annulation de
concerts live à cause de l'épidémie de coronavirus, a engrangé moins de
200.000 livres de revenus et essuyé une perte de 16,1 millions avant
impôt en 2019. « Cet achat met le groupe sur une voie qui devrait lui permettre de devenir rentable assez rapidement », a confié au « Financial Times » le directeur général de MelodyVR, Anthony Matchett.
L'opération,
qui a nécessité la levée de 15 millions de dollars en actions nouvelles
mardi, laissera 11,5 % du capital à RealNetworks. Le prix intègre
15 millions de dollars en cash, 11 millions en actions MelodyVR et
44 millions qui seront versés à des éditeurs de musique et des labels en
contrepartie de dettes que Napster doit honorer.
Alexandre Counis ( Correspondant à Londres)
Par lesechos.fr